Et des travaux et des jours, chacun se souviendra de la rumeur des charrettes et des pirogues chargées de bottes de mil, des étals modestes sur les marchés et des pêcheurs lançant l’épervier dans le courant…
Nous avons croisé une foule nombreuse débarquant des grandes pirogues maliennes ou accourue par toutes les pistes de la région. Une foule encore plus dense se presse dans les étroites travées, entre les étalages précaires. Le marché simule une abondance extrême dans un pays où tout est rareté. Tous ces sacs de riz, ces tas d’épices, ces batteries de vaisselle chinoise à fleurs, ces cotonnades hollandaises mêlées aux cotons indigos des touaregs, ces empilements de poissons séchés, ces paniers de gombo et de petites tomates, ces sacs de manioc en petits morceaux blancs prêts à bouillir, ces colifichets, perles et boîtes de cirage, montent à la tête de l’acheteur sans le sou qui flâne entre les merveilles exposées et qui rentrera chez lui avec quelques morceaux de sucre cassés au marteau de cuivre et une paire de brochettes empaquetées dans un papier crasseux, arraché à l’enveloppe d’un sac de ciment.
Tout est possible au marché…L’herbe en tas pour le fourrage des animaux. Les grandes perches pour les piroguiers, les bottes de mil, les plaques de sel venues du Mali ou les bouts de laine rouge au plaisir des dames. Une fumée de poussière plane dans les allées entre les abris de paille. On y voit des chapeaux peuls, des bonnets, des chèches touaregs, des tresses savantes. Chacun traîne son sac en plastique avec quelque trésor à vendre ou déjà trouvé.
Les enfants flânent et jouent. Les jeunes femmes font les belles. Les vieilles discutent âprement. Les hommes grognent autour du teuf-teuf du moulin : un diesel épuisé qui entraîne le « décortiqueur » de riz ou le broyeur de mil. Sur la berge du port aux pirogues, un préposé se démène pour faire payer l’inévitable taxe et brandit ses reçus pré signés.
Au marché au bétail des troupes d’animaux arrivent par vagues : moutons, chèvres, ânes, bœufs à longues cornes. Les bergers courent pour discipliner les animaux effrayés, brandissant leur grand bâton, rond et lisse, qui commande le mouvement des troupeaux. Les bêtes sont dirigées au mètre près et se calment à l’emplacement prévu. Progressivement, avec la chaleur, la rumeur prend de l’ampleur au-dessus de la foule des hommes qui négocient, attendent, jouent avec les réponses, s’amusent et s’interpellent, des billets dans leurs mains pour montrer leur bonne foi. Le jeu du marchandage est un rituel plus qu’une nécessité économique.
A l’écart, on trouve le parc aux dromadaires, où, en général, les bêtes sont pouilleuses et mal fichues. Celui qui cherche la bête de race doit s’enfoncer dans le désert et prouver au vendeur qu’il fera honneur à la qualité de l’animal. Ici, ce sont des animaux de travail. Parfois on peut voir des chevaux, nerveux, maigres, mal soignés, vendus là pour servir à l’image d’un chef de village ou au descendant d’une lignée. Peu importe la beauté du canasson. C’est un cheval, cela suffit à grandir le propriétaire.
Et puis, plus loin, dans les rues voisines, les boutiques des commerçants haoussas. Prétentieux, regardant le chaland avec la hauteur de ceux qui possèdent. Ils disposent d’eau minérale en bouteilles, de sucre en morceaux Beghin-Say, de boîtes de lait Gloria et de cubes Maggi, de caisses de thé vert venues de Chine, de « Vache qui rit » parfois. Produits exotiques s’il en est.
Chacun se mesure à ce qu’il croit pouvoir acheter et montrer. Le paraître, toujours, surtout lorsqu’on n’a rien…
Nous avons croisé une foule nombreuse débarquant des grandes pirogues maliennes ou accourue par toutes les pistes de la région. Une foule encore plus dense se presse dans les étroites travées, entre les étalages précaires. Le marché simule une abondance extrême dans un pays où tout est rareté. Tous ces sacs de riz, ces tas d’épices, ces batteries de vaisselle chinoise à fleurs, ces cotonnades hollandaises mêlées aux cotons indigos des touaregs, ces empilements de poissons séchés, ces paniers de gombo et de petites tomates, ces sacs de manioc en petits morceaux blancs prêts à bouillir, ces colifichets, perles et boîtes de cirage, montent à la tête de l’acheteur sans le sou qui flâne entre les merveilles exposées et qui rentrera chez lui avec quelques morceaux de sucre cassés au marteau de cuivre et une paire de brochettes empaquetées dans un papier crasseux, arraché à l’enveloppe d’un sac de ciment.
Tout est possible au marché…L’herbe en tas pour le fourrage des animaux. Les grandes perches pour les piroguiers, les bottes de mil, les plaques de sel venues du Mali ou les bouts de laine rouge au plaisir des dames. Une fumée de poussière plane dans les allées entre les abris de paille. On y voit des chapeaux peuls, des bonnets, des chèches touaregs, des tresses savantes. Chacun traîne son sac en plastique avec quelque trésor à vendre ou déjà trouvé.
Les enfants flânent et jouent. Les jeunes femmes font les belles. Les vieilles discutent âprement. Les hommes grognent autour du teuf-teuf du moulin : un diesel épuisé qui entraîne le « décortiqueur » de riz ou le broyeur de mil. Sur la berge du port aux pirogues, un préposé se démène pour faire payer l’inévitable taxe et brandit ses reçus pré signés.
Au marché au bétail des troupes d’animaux arrivent par vagues : moutons, chèvres, ânes, bœufs à longues cornes. Les bergers courent pour discipliner les animaux effrayés, brandissant leur grand bâton, rond et lisse, qui commande le mouvement des troupeaux. Les bêtes sont dirigées au mètre près et se calment à l’emplacement prévu. Progressivement, avec la chaleur, la rumeur prend de l’ampleur au-dessus de la foule des hommes qui négocient, attendent, jouent avec les réponses, s’amusent et s’interpellent, des billets dans leurs mains pour montrer leur bonne foi. Le jeu du marchandage est un rituel plus qu’une nécessité économique.
A l’écart, on trouve le parc aux dromadaires, où, en général, les bêtes sont pouilleuses et mal fichues. Celui qui cherche la bête de race doit s’enfoncer dans le désert et prouver au vendeur qu’il fera honneur à la qualité de l’animal. Ici, ce sont des animaux de travail. Parfois on peut voir des chevaux, nerveux, maigres, mal soignés, vendus là pour servir à l’image d’un chef de village ou au descendant d’une lignée. Peu importe la beauté du canasson. C’est un cheval, cela suffit à grandir le propriétaire.
Et puis, plus loin, dans les rues voisines, les boutiques des commerçants haoussas. Prétentieux, regardant le chaland avec la hauteur de ceux qui possèdent. Ils disposent d’eau minérale en bouteilles, de sucre en morceaux Beghin-Say, de boîtes de lait Gloria et de cubes Maggi, de caisses de thé vert venues de Chine, de « Vache qui rit » parfois. Produits exotiques s’il en est.
Chacun se mesure à ce qu’il croit pouvoir acheter et montrer. Le paraître, toujours, surtout lorsqu’on n’a rien…