lundi 2 février 2015

Pollen : Comment la palynologie peut nous aider à comprendre les évolutions du climat ?

C'était le dernier mardi de Doisneau avant le déménagement dans les préfabriqués, et ce jour-là nous avons reçu Nathalie Combarieu-Nebout, directrice de recherche en palynologie qui doit elle-même déménager son laboratoire et passer d'un site à Saclay au laboratoire de paléontologie humaine de Paris dépendant du Muséum d'histoire naturelle. Un total hasard

Au programme, les pollens… et surtout les informations qu'ils peuvent nous donner sur l'évolution du climat. Mais dans un premier temps quelques précisions s'imposent.

Pour le profane, les pollens, ça fait éternuer, c'est de la poussière jaune sur les sols, les voitures, les balcons et le linge qui sèche : une vraie calamité printanière… Bref, ce n'est pas agréable du tout.

Plus sérieusement, le mot pollen vient du grec "polliné" qui veut dire poudre ou poussière. Les grains de pollen sont les éléments reproducteurs mâles de la plante. Leur taille varie de 5 à 200 microns. Ils fécondent les étamines, qui sont les éléments femelles de la plante.


Suit un exposé d'histoire géologique et naturelle de la Terre. Il n'y a pas toujours eu des plantes sur notre planète. A l'ère primaire, il y avait un monde gris, puis le monde est devenu vert au Carbonifère, avec l'arrivée des fougères arborescentes et des conifères. Et avec eux les pollens. Au Crétacé, apparaissent les plantes à fleurs et le monde devient alors coloré. 

Pour déterminer les pollens et dresser une typologie, on se fie à leur taille, leur forme, leurs apertures (la zone où germe le tube pollinique), les sculptures de leur enveloppe. Ainsi on détermine la famille, le genre et l'espèce.


Les pollens sont transportés par différents véhicules. Ceux qui sont transportés par des insectes pollinisateurs, comme les abeilles, sont dits entomophiles. Ceux qui peuvent être transportés par l'eau ou par le vent sont dits anémophiles. Une partie des pollens déplacés atteint sa cible mais les autres se déposent sur les fonds sous-marins et les lacs. Ils nous permettent de reconstituer la végétation d'une époque donnée et donc en déduire le climat. On peut ainsi connaitre l'évolution des paysages d'une même zone au cours du temps.


Pour faire des prélèvements, on peut utiliser différentes méthodes : effectuer des carottages, piéger les pollens grâce à des filtres, aller les chercher sur les roches qui affleurent ou à l'aide de bateaux océanographiques.

Les échantillons prélevés sont nettoyés à l'acide. L'acide n'élimine que les boues car les pollens sont particulièrement résistants. On peut procéder alors à leur comptage au microscope. On obtient pour chaque strate un spectre pollinique, et en superposant les spectres polliniques, on obtient un diagramme pollinique.

Notre invitée nous propose ensuite une étude de cas en Méditerranée, exemple intéressant car les gradients thermiques et de précipitations sont importants, avec des contrastes très prononcés entre les étés très secs et les intersaisons très pluvieuses. De plus, c'est une zone menacée par des événements climatiques extrêmes dans une région à densité de population importante et aux ressources en eau parfois menacées.
Grâce à cette étude, on sait qu'il y a 2 580 000 ans, le climat était sec et frais. On peut également reconstituer les cycles récents qui sont différents. Connaitre l'évolution des cycles peut éventuellement permettre d'anticiper des problèmes, des migrations de populations ou des changements de culture agricole.


La palynologie peut aussi nous donner des informations sur la manière dont l'Homme impacte l'environnement avec les cultures, et peut permettre de dresser une cartographie utile des émissions de pollens pour la médecine et la prévention des allergies (réseau RNSA). En agriculture, à l'INRA (Institut National de Recherche Agronomique), on travaille sur la prévision des récoltes, et aussi sur la mélissopalynologie, à savoir la composition des miels et le repérage des polluants dans les miels. Il est à noter que la palynologie n'intervient pas seule et que la multianalyse de tous ces phénomènes complexes faisant intervenir différentes spécialités est indispensable.


 Pour aller plus loin :
- Sur le site Universciences, Delphine Barbier-Pain, également palynologue, présente son travail de recherche.
- Le rôle des abeilles est évidemment très important dans la pollinisation. Pour en savoir plus sur le rôle de ces insectes, vous pouvez trouver au CDI : L'abeille, sentinelle de l'environnement rédigé par Henri Clément et Fabienne Chesnais.

Illustrations :
 - Male pines cones par Martin LaBar. Licence Creative Commons cc by-nc 2.0
 - Le grain de pollen : un outil microscopique. Extrait du diaporama de Nathalie Combarieu-Nebout
 - A happy bee in a crocrus flower pokes his (her ?) head up to say hello to spring par morganglines. Licence Creative Commons  cc by-nc-sa 2.0
 - Pollen par dan.kristiansen. Licence Creative Commons cc by-nc-nd 2.0

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